Sans talent et sans envie

Publié le par Jérôme COLLIN

Défaite hier à Kiev contre l’Ukraine (0-2), l’équipe de France de football se qualifie pour les quarts de finale de l’Euro 2012, mais ne convainc pas les observateurs ni même Laurent Blanc. Samedi prochain, les Bleus auront fort à faire avec un quart explosif face à l’Espagne, championne d’Europe et du monde en titre.
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Une vague d’espoir s’était levée suite à la victoire contre l’Ukraine vendredi dernier. La malédiction longue e six ans était enfin abrogée par la première victoire des Bleus en compétition officielle depuis 2006 et une victoire en demi-finale contre le Portugal. Six annuités de déboires sportifs et médiatiques, marquées notamment par l’affaire Knysna de triste réputation.
Presque deux ans après sa prise de fonction en tant que sélectionneur des Bleus, Laurent Blanc consolidait par cette victoire contre le pays co-organisateur le retour en grâce de cette sélection, totalement implosé en Afrique du Sud lors de la Coupe du Monde 2010, poursuivant une série de 23 matchs consécutifs sans défaite. Une panacée pour tous les supporters de cette équipe de France.
Comme un seul homme (ou presque), la France avait salué et applaudi cette victoire plaçant les Bleus en position idéale pour une qualification en quart de finale, seulement ternie par la malheureuse disparition du commentateur vedette Thierry Roland.
Rassurante en défense, décisive en attaque, faisant circuler le ballon harmonieusement, cette sélection tricolore avait globalement séduite face à l’Ukraine dans un match retardé par un orage violent.

La foudre s’est finalement abattue  à retardement sur ces Bleus… à retardement dans cette rencontre. Consciente de sa position favorable dans l’optique d’une qualification, une défaite par un but d’écart permettant même celle-ci de s’accomplir, la sélection française a totalement déjoué et s’est fourvoyée dans une situation périlleuse. Face à des Suédois incisifs et techniquement propres, les Bleus ont subi le jeu et ont montré un visage médusant de médiocrité et d’inactivité, symbolisé par une défense centrale pataude et dépassée par la vivacité et la roublardise des attaquants nordiques, et par un milieu de terrain très peu créatif et absolument pas inspiré dans la construction du jeu.

L’équipe de France n’a jamais donné le sentiment de vouloir prendre des risques, ayant très peu d’intention de création dans le jeu, peu d’imagination. Plus dans la gestion que dans l’action. Or, malgré sa place de leader du groupe D, la France ne pouvait se permettre d’aborder ce match sans vouloir réellement le disputer, en attendant avec impatience le coup de sifflet final synonyme de place en quart de finale. D’autant plus que cette équipe n’est jamais aussi vulnérable que quand elle ne prend pas d’initiatives. Revenir à la pause avec un score nul et vierge était un moindre mal tant les Français ont brillé par leur apathie. Quand Mexes ne se trouait pas derrière (à ce titre sa suspension pour le prochain match est sans doute un mal pour un bien), c’étaient les artilleurs français qui frappaient au but sans conviction ni précision. La frustration était palpable dans les rangs tricolores, chez Ribéry le premier. Celui qui dans un passé proche fut honni et critiqué par tous pour son comportement déplorable (participation à la grève de Knysna oblige) et son apport proche du néant sportivement mérite aujourd’hui la reconnaissance de son engagement et de sa détermination. Sur son aile gauche, le Bavarois a lancé des banderilles avec des sprints impressionnants, et n’a pas hésité à provoquer des duels.

Les propos de Nasri après la rencontre témoignent de l’unique volonté de sceller cette qualification quitte à ne pas réaliser une bonne prestation («On a été dominés, peut-être qu’on a fait preuve d’un certain relâchement, mais maintenant l’objectif est atteint », « Il ne faut pas faire la fine bouche »). Le faible apport offensif des latéraux français que sont Clichy à gauche et Debuchy à droite prouvent également la fébrilité des Bleus, leur hésitation à se livrer. Certes, la perspective d’un quart de finale peut rendre les joueurs timorés, peut les paralyser. Mais dans ce cas-là, il est peu probable que cette sélection n’aille aussi loin qu’on le souhaiterait. D’autant plus qu’au prochain tour, les Bleus affronteront l’Espagne, qui n’est pas au meilleur de sa forme mais reste un sacré client.

Cette déroute face à l’Ukraine est également à mettre sur le compte des erreurs de Laurent Blanc dans sa composition d’équipe et dans sa gestion des hommes. Le sélectionneur français a semble-t-il du mal à se faire à l’idée d’adapter et de modifier son équipe en fonction des forces et faiblesses de son adversaire. Blanc a voulu faire confiance à des joueurs vifs et percutants sur les côtés de son attaque (Ribéry et Ben Arfa) et a reconduit Benzema en pointe. Pourquoi pas? Cependant, ce système a rapidement démontré ses faiblesses, sans pour autant que le sélectionneur ne procède à des changements ou à une réorganisation tactique. Face à la densité des deux rideaux défensifs suédois, face à la taille imposante de nombreux joueurs adverses, Olivier Giroud aurait pu apporter sa puissance comme l’a fait avec aplomb et réussite Zlatan Ibrahimovic côté suédois, et jouer en point d’appui pour créer des brèches, des décalages propices aux occasions de but. Le scoreur montpelliérain s’est d’ailleurs manifesté aussitôt entré sur le terrain par une tête proche d’accrocher le cadre…
Nasri fut lui proche du néant au milieu de terrain, alors même qu’il a la responsabilité d’orienter le jeu de son équipe, et de mettre dans des positions idéales ses coéquipiers. Dans l’autre camp, Kallström a joué juste et proprement, quand Samir Nasri jouait à contre-temps et sans vitesse d’exécution.

La qualification française ne tient qu’à un fil. Dans l’autre rencontre du groupe D, Wayne Rooney a signé son retour de suspension en inscrivant l’unique but de la rencontre. Mais l’Ukraine s’est vue injustement refusé un but qui aurait mis le feu à tout un pays, mais qui aurait également mis la pression sur l’équipe de France.

La France a jusqu’à samedi pour se remettre d’aplomb et repartir dans le sens de la marche. Le défi sera cette fois énorme face à l’Espagne. Les Bleus devront majoritairement courir après le ballon et procéder par contre. La vitesse et la percussion seront deux maîtres mots pour espérer réaliser cet exploit. Sinon, les vacances seront à l’ordre du jour pour les Français, et la FFF rendra sa décision quant au sort réservé à Laurent Blanc.

Jérôme COLLIN

Publié dans Football

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